C’est à des retrouvailles avec cet homme célèbre en son temps que, le temps d’une exposition à la Brafa (prolongée par un catalogue abondamment illustré), nous convie Francis Maere. Un antiquaire – récemment promu avec le francophone Didier Claes, vice-président du nouveau conseil d’administration de la Brafa – passionné par les tableaux et sculptures d’artistes belges des XIXe et XXe siècle qu’il défend en deux galeries.

Créée en 1985, Ooidonk Fine Arts se centre surtout sur les impressionnistes, expressionnistes, premiers abstraits et sur le groupe de Laethem-Saint-Martin.

Et depuis octobre 2011, l’antiquaire s’est installé à Gand, au premier étage de l’Hôtel Falligan, vaste maison de maître du XVIIIe siècle. Un lieu bellement restauré pour promouvoir l’art belge du début du siècle, accueillir tant peintures anciennes que créations contemporaines, organiser des dîners, des conférences, des concerts et exposer – en exclusivité pour la Belgique ! – les bronzes animaliers aussi stylisés qu’élégants du jeune artiste anglais Jonathan Knight.

 

Alliance de l’art et de la politique

 

Rodolphe De Saegher est né à Gavere en 1871 et décédé à Gand en 1941. Ce fils de la bourgeoisie gantoise mena de front deux carrières. Une vie politique, quand il est un avocat connu du barreau de Gand, membre du parti libéral, du conseil communal puis échevin de la culture et député. Et, parce qu’il avait fréquenté l’académie de Gand, une vie artistique qu’il démarre en fondant en 1900 la Petite Revue illustrée de l’art et de l’archéologie en Flandre. Il en devient le rédacteur en chef, engage comme directeur de l’illustration le dessinateur et graveur Armand Heins et, au fil de ses articles, défend le travail des « maîtres du feutre et du crayon ». Carrière artistique toujours, De Saegher s’engage dans la fondation du premier cercle artistique majeur en Belgique « Vie et Lumière » et, en 1905, participe, en compagnie d’Anna Boch, Georges Lemmen, James Ensor, à l’exposition de « La Libre Esthétique » placée sous le signe de « L’évolution externe de l’impressionnisme ».

 

Une puissance expressive

 

Des créations de Rodolphe De Saegher, Joost De Geest (*) écrit que « l’on ne peut passer à côté d’une certaine similitude entre son œuvre et celle d’Emile Claus. Lequel utilisait aussi fréquemment le pastel, une technique très prisée par les autres membres de “Vie et Lumière” et perçue comme contemporaine à l’instar de l’aquarelle (qui est en fait une technique beaucoup plus ancienne). On ne peut ignorer le fait que la Belgique joua un rôle de pionnier en Europe dans le domaine de l’aquarelle en tant que forme d’art à part entière ! ».

Artiste innovant, moderne, auteur de nombreux petits formats, De Saegher avait pour thème de prédilection les paysages de la Lys et de ses environs, les jardins tout de verdures et de fleurs ou noyés de brume et de rosée… Joost de Geest souligne « les aplats de couleurs très spontanés, qui rappellent le courant (postérieur) d’abstraction lyrique. Une tendance à l’abstraction quand on rencontre çà et là une étendue d’herbe ou de foin, pleine de couleur, qui se prolonge dans un tourbillon d’air. De l’horizon on n’aperçoit que quelques bandes : la suggestion est suffisante ».